Comme Napoléon, vous avez toujours rêvé de conquérir l’Outre-Manche et d’ouvrir des bureaux à Londres, mais le Brexit vous a stoppé net dans votre élan ? Une fois n’est pas coutume, ne faites pas comme l’Empereur, franchissez le Channel… Mais préparez-vous, car « Anticiper c’est vaincre » !
Longtemps, nous arrivions à Waterloo Station, stigmatisés à chaque annonce ferroviaire…Beau cadeau de nos meilleurs ennemis, humour so British.
Le Général de Gaulle, en son temps, ne cessait de le dire : les anglais auront toujours « un pied dedans et un pied dehors »…Et bien guess what ?!! Les Anglais ont maintenant un pied dehors et un mini pouce dedans ! Mais on peut en tirer profit, pour ceux qui sont persévérants pour ouvrir des bureaux à Londres et n’ont pas peur d’appréhender les sujets douaniers et fiscaux.
Commençons par le commencement :
- Le Royaume-Uni a quitté le territoire douanier de l’Union européenne (normalement ça vous le saviez) => Donc, malgré l’accord conclu (on vous en parle juste après), le Royaume-Uni est devenu un pays tiers à l’UE et est donc traité, d’un point de vue douanier et fiscal, comme tout autre pays tiers ;
- Ça signifie la fin de la libre circulation des marchandises et donc :
-> Des formalités douanières à accomplir (dans l’UE et au UK) ;
-> Des coûts: paiement des droits de douane éventuels et de la TVA à l’importation ;
-> Des Risques: nouvelles normes, retour des contrôles douaniers, blocages, délais.
Mais alors, voyant ceci, vous pourriez avoir le même réflexe que l’Empereur : « diantre, c’est trop compliqué en fait » ?!
Mais, côté français, on a inventé les Bretelles, le Champagne et la conduite du bon côté. Alors on ne va pas se laisser abattre, car si c’est compliqué, il y aura moins de concurrence et plus de demandes : en quelques lignes, on va vous expliquer comment Napoléon et les siens vont vaincre le Brexit.
Voici donc les étapes à accomplir pour importer vos produits au UK, et les recommandations pour chaque étape afin que ça se passe le mieux possible :
- Des formalités douanières à accomplir : keep calm, on délègue !
->L’enregistrement auprès des douanes (pour l’exportation et un pour l’importation) demande simple et rapide en ligne ;
-> Le dépôt obligatoire de déclaration en douane: à déposer auprès des douanes UE à l’exportation et auprès de HMRC à l’importation au UK, mais vous pouvez recourir au service d’un représentant en douane (RDE) pour les réaliser (il faudra simplement le payer et prévoir un contrat spécifique) ;
-> Un délai possible pour la vérification des déclarations, même s’il ne devrait pas y avoir de blocage frontière car on peut déposer les déclarations en anticipation (contrôle documentaire) ; - Des rôles et responsabilités à conférer : ça se négocie (plus ou moins…) !
-> Être exportateur / importateur : pour cela il faut être établi sur le territoire concerné (UE/GB) – on recommande généralement que chaque partie (vendeur ou acheteur) agisse dans son propre pays, attention aux Incoterms ;
-> En tant qu’exportateur / importateur, on est TOUJOURS responsables même si on fait appel à un représentant ;
-> Ne pas déclarer n’importe quoi : les risques douaniers peuvent aller jusqu’à une pénalité de 3 fois la valeur des marchandises et le délai de reprise est de 5 ans - Des fondamentaux à maitriser : pour sécuriser et optimiser !
-> A chaque marchandise son code douanier, et à chaque code son taux de droit de douane applicable : il faut déterminer le bon taux pour payer le bon montant : attention les codes peuvent varier entre l’exportation en UE et l’importation au UK ;
->Identifier l’origine du produit, c’est-à-dire sa nationalité (pays de production du pays) : celle-ci aura un impact sur le montant des droits de douane (cf. partie optimisation) ;
-> Déclarer la bonne valeur en douane, c’est-à-dire la valeur transactionnelle avec les ajustements appropriés (ajouter les frais de transports, les redevances, les frais de moules, etc.). - Maitriser le flux TVA : pour la récupérer !
-> Seul l’importateur peut récupérer la TVA payée à l’importation, sauf que ce n’est pas si simple : au Royaume-Uni, l’importateur doit être le propriétaire des biens au moment de l’importation (i.e. détenteur du titre de propriété ou faculté à agir comme un propriétaire) ;
-> Autoliquidation de la TVA à l’importation : sur demande ;
-> Surtout récupérer toutes les déclarations d’exportation avec le statut ECS sortie au risque de voir l’exonération de TVA remise en cause (et 20% de la valeur des marchandises, ça pique…). En effet, si on facture hors taxe, il faut prouver la sortie effective des marchandises du territoire… - Maitriser les nouvelles normes applicables : pour ne pas aller en prison !
-> Bye bye CE, welcome UKCA -> l’avantage, une période de tolérance étendue en 2023 ;
-> Avoir les coordonnées d’un importateur local responsable vis-à-vis des autorités ;
-> Maitriser les nombreuses réglementations : food regulations, produits soumis à accises, biens à double usage, produits d’origine animale, cosmétiques, contrôles sanitaires et phytosanitaires, etc.
Vous commencez à avoir des sueurs froides ? Ne vous inquiétez pas ! On vous donne aussi les armes pour optimiser au maximum vos flux.
Alors comment réduire ces coûts ?
Pensez à l’origine préférentielle ! L’UE et le Royaume-Uni ont conclu un accord de libre-échange. Ainsi, les produits originaires de l’UE (c’est-à-dire intégralement obtenus dans l’UE ou ayant subi une transformation suffisante dans l’UE) sont exonérés de droits de douane à l’importation au Royaume-Uni et inversement.
Pensez aux régimes particuliers ! Le Royaume-Uni a adopté les mêmes régimes particuliers que l’UE. Ainsi, vous pouvez suspendre les droits et taxes dus à l’importation au UK si :
- Votre marchandise ne fait que passer par la Grande-Bretagne (transit) ou est stockée avant d’être réexportée (entrepôt sous douane) : on suspend la fiscalité !
- Votre marchandise est importée temporairement sans subir de modification (admission temporaire) ou pour être transformée (perfectionnement actif) : on suspend la fiscalité !
- Votre marchandise revient après avoir été exportée (régime des retours) : on suspend la fiscalité !
Et comment réduire les délais ?
- Le transit ! Le Royaume-Uni a rejoint la Convention sur le transit commun.
- Le Goods Vehicle Movement Service – GVMS ! Le GVMS est une plateforme informatique du gouvernement britannique pour acheminer des marchandises vers le territoire douanier du UK grâce à la frontière intelligente ;
- Le statut OEA : le Saint Graal de la douane, le statut d’Opérateur Economique Agréé. Avec ce statut, vous devenez en quelque sorte le meilleur ami des autorités douanières, avec un dédouanement accéléré.
On espère vraiment qu’avec tout ça vous êtes rassurés ! Parce qu’honnêtement, ça serait dommage de renoncer à commercer avec nos meilleurs ennemis ou d’ouvrir des bureaux à Londres tout simplement parce qu’ils ont décidé de divorcer.
Et gardez en tête que, pour les consommateurs que nous sommes tous, les impacts douaniers et fiscaux du Brexit ne s’appliquent pas seulement aux entreprises, les particuliers aussi sont concernés. Attention aux commandes sur le net et au retour de France avec des caisses de vins…
Avec tous ces bons conseils, vous êtes parés pour toutes vos opérations avec le Royaume-Uni.
Développez-vous, exportez, vendez… on s’occupe du reste. Attention messieurs les Anglais, on arrive!
Tiphaine Bernard
Avocate
tiphaine.bernard@lh-lf.com
Stanislas Roquebert
Avocat Associé
stanislas.roquebert@lh-lf.com
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